Ma parole est libre, ma plume aussi
ACP N°175 Arpenter le Champ Pénal
Approche indisciplinaire
La cotisation annuelle a été fixée à 20€ (10€ pour les étudiants et les personnes à la recherche d’un emploi). Le siège social de l’Association a été fixé au domicile de son président, Pierre V. Tournier, 43, rue Guy Môquet 75017 PARIS. Tél Fax Rép. 01 42 63 45 04.
Bulletin d’adhésion et compte rendu de l’Assemblée générale peuvent vous être adressés sur simple demande à pierre-victor.tournier@ wanadoo.fr
Prochaine réunion du conseil (trimestrielle et publique) : samedi 10 avril 2010 de 10h à 13h, Cité Saint-Martin, 4, rue de l’Arsenal, Paris 4ème, salle Van Gogh, métro Bastille.
Voir infra
Attendez-vous à trouver … 01. Les comptes du lundi : Les comptes du lundi : plus de 100 000 années de détention
prononcées en 2008
02. Le kiosque
03. OPALE : Etat du surpeuplement carcéral au 1er janvier 2010 par type
d’établissement - ou de quartier - Colloques & Séminaires
04. Saint-Denis. « Travail, territoires, pouvoirs »
05. Paris. « A propos de la réforme des services pénitentiaires d’insertion et
de probation »
Réflexions & Nouvelles
06. Chronique de Christian Demonchy, L’arbitraire de l’arbitrage
07. Conférence de presse de Michèle Alliot-Marie sur la politique pénitentiaire
Et remarques de Pierre V. Tournier : « Il nous faut insister »
08. Nominations
Déviances & Citoyenneté
09. L’association « DES Maintenant en Europe » est constituée
10. Paris : Atelier « Crime, justice des hommes et Christianisme », 2ème rencontre.
11. Lyon : « Bouleversements et compromis du soin psychique dans la clinique
contemporaine »
12. Paris : « L’indépendance est-elle soluble dans le management ?International
13. Appel à contributions : Violences juvéniles sous expertises, XIXe-XXIe siècles
14. Interlaken (Suisse) : « Justice pénale, des ambitions aux résultats »
15. International Centre for Prison Studies (Londres)
25 pages
*** LES COMPTES DU LUNDI ***
- 1. - Plus de 100 000 années de détention (fermes) prononcées en 2008Source : Pierre V. Tournier, Dictionnaire de démographie pénale, nouvelle version (données 2010), à paraître.
Le tableau qui suit permet de connaître l’évolution d’un certain nombre d’indicateurs concernant les sanctions prononcées en matière de crimes et de délits de 2000 à 2008. Rappelons que sur les 583 917 prononcées pour ce type d’infraction, 55 % sont des peines privatives de liberté. Mais si on se limite aux peines fermes (ou comportant une partie ferme), la proportion n’est plus que de 21%. Le quantum ferme moyen est de 9,7 mois : 7,2 mois pour les délits et 9,3 ans pour les crimes. Dans leur ensemble, les juridictions ont prononcé, en 2008, 101 430 années de détention (fermes), soit 1,5 % de plus qu’en 2007. Cet indice avait augmenté de près de 8 % en 2007, par rapport à 2006.
Enfin, pour 100 condamnations prononcées pour crime ou délit (sanctions de toutes natures), on compte 17 années de détention (fermes). Sur les années 2000-2004, cet indice etait en moyenne de 20. Depuis 2005, il tourne autour de 16-17
PVT
a. - Sanctions prononcées pour crimes et délits : 2000 – 2004 Champ : France entière
2000 | 2001 | 2002 (2) | 2003 | 2004 | |
Effectifs | 449 850 | 425 811 | 387 741 | 437 283 | 489 111 |
Proportion de peines privatives de liberté | 63 % | 49 % | 54 % | 68 % | 53 % |
Proportion de peines privatives de liberté fermes ou avec sursis partiel | 22 % | 18 % | 21 % | 25 % | 19 % |
Quantum ferme moyen (3) | 9,6 m | 9,9 m | 10 m | 10 m | 9,7 m |
Crimes (3) | 9,0 a | 9,3 a | 9,6 a | 8,9 a | 8,7 a |
Délits | 6,8 m | 6,7 m | 7,3 m | 7,5 m | 7,3 m |
Total d’années de détention prononcées (4) | 80 200 | 80 700 | 87 200 | 91 400 | 93 300 |
Années de détention pour 100 condamnations prononcées | 18 | 19 | 22 | 21 | 19 |
ACP / Données élaborées à partir de la statistique issue du casier judiciaire, Ministère de la Justice (1)
b. - Sanctions prononcées pour crimes et délits : 2000 – 2004 Champ : France entière
2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | |
Effectifs | 554 077 | 585 245 | 620 242 | 583 917 | |
Proportion de peines privatives de liberté | 49 % | 52 % | 54 % | 55 % | |
Proportion de peines privatives de liberté fermes ou avec sursis partiel | 18 % | 20 % | 21 % | 21 % | |
Quantum ferme moyen (3) | 9,8 m | 9,2 m | 9,2 m | 9,7 m | |
Crimes (3) | 9,1 a | 9,1 a | 9,2 a | 9,3 a | |
Délits | 7,2 m | 6 ,8 m | 6,8 m | 7,2 m | |
Total d’années de détention prononcées (4) | 93 500 | 92 700 | 99 900 | 101 430 | |
Années de détention pour 100 condamnations prononcées | 17 | 16 | 16 | 17 |
ACP / Données élaborées à partir de la statistique issue du casier judiciaire, Ministère de la Justice (1)
(1) Timbart Odile, « Les condamnations. Provisoires, Année 2008 », Ministère de la justice, Sous direction de la statistique, des études et de la documentation, novembre 2009, 254 pages.
(2) 2002 année d’amnistie.
(3) Non compris les perpétuités.
(4) Y compris les perpétuités, ramenées à 20 ans.
*** LE KIOSQUE ***
- 2. - Articles
Champ Penal / Penal Field - Nouvelle revue française de criminologie / New French Journal of Criminology
Hugues de Suremain et Jean Bérard, « La gestion des longues peines au révélateur des luttes juridiques »
Marie-Lyne Vachon, Dominique Robert et Martin Dufresne, « Vos gènes s'il vous plaît ! La banque canadienne de données génétiques et la présomption d’innocence à l'ère du risque »
Laura Aubert, « Appréhension systématique des phénomènes de délinquance et troisième voie : les dilemmes d’un parquet divisé »
Bulletin
La lettre d'information n° 5 sur les règles pénitentiaires européennes (RPE), Direction de l’administration pénitentiaire : Rapport d'évaluation de la mission d'évaluation de la mise en oeuvre des RPE conduite par Jean Charbonniaud - Point sur la labellisation des établissements pénitentiaires. Interview de personnels de la maison d'arrêt de Riom - Expérimentation : Focus sur les projets innovants : les bornes de saisie des requêtes
*** OPALE ***
Observatoire des prisons et autres lieux d’enfermement
- 3. - Etat du surpeuplement carcéral au 1er janvier 2010 par type d’établissement - ou de quartier -France entière
Ensemble | Maisons d’arrêt* | Etablissement pour peine | |
Places opérationnelles | 54 988 | 33 265 | 21 723 |
Détenus | 60 978 | 41 401 | 19 577 |
Surpopulation apparente | 5 990 | 8 136 | - 2146 |
Places inoccupées | 3 663 | 1 117 | 2 546 |
Détenus en surnombre | 9 653 | 9 253 | 400 |
% de détenus en surnombre / détenus | 16 % | 22 % | 2,0 % |
Métropole
ENS. | Maisons d’arrêt* | Etablissement pour peine | |
Places opérationnelles | 51 481 | 31 416 | 20 065 |
Détenus | 56 472 | 38 757 | 17 715 |
Surpopulation apparente | 4 991 | 7 341 | - 2 350 |
Places inoccupées | 3 461 | 1 015 | 2 446 |
Détenus en surnombre | 8 452 | 8 356 | 96 |
% de détenus en surnombre / détenus | 15 % | 22 % | 0,5 % |
Outre mer
ENS. | Maisons d’arrêt | Etablissement pour peine | |
Places opérationnelles | 3 507 | 1 849 | 1 658 |
Détenus | 4 506 | 2 644 | 1 862 |
Surpopulation apparente | 999 | 795 | 204 |
Places inoccupées | 202 | 102 | 100 |
Détenus en surnombre | 1 201 | 897 | 304 |
% de détenus en surnombre / détenus | 27 % | 34 % | 16 % |
*** COLLOQUES ET SÉMINAIRES ***
*** PARIS RIVE DROITE, RIVE GAUCHE ***
- 4. - Saint-Denis. 28 janvier 2010. 10h – 16h30. « Travail, territoires, pouvoirs ». Journée d’étude organisée par Danielle Tartakowsky (EA 1571 Paris 8), Michel Margairaz (IDHE Paris 1) et Michel Pigenet (CHS XXe s.UMR 8058 Paris 1), dans le cadre du séminaire « Histoire sociale et économique du politique, histoire politique du social et de l’économique », Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis.
- Emmanuel Bellanger, historien, CNRS, CHS du XXe siècle, « Pour une nouvelle histoire suburbaine : lorsque banlieues rime avec solidarités intercommunales et financières »
- Sébastien Chauvin, sociologue, Amsterdam, « Organiser les journaliers : travailleurs précaires et community organizing à Chicago dans les années 2000 »
- Denis Merklen, sociologue, Paris 7 « Quartiers populaires, quartiers politiques »
- Sylvie Tissot, sociologue, Strasbourg 2, « L’Etat et les quartiers. Genèse d’une catégorie de l’action publique ».
- Lieu : Musée d’art et d’histoire de Saint Denis, 22, rue Gabriel Peri, 93200 SAINT-DENIS.
* Contact : www.musee-saint-denis.fr
______________________________- 5. - PARIS. 16 février 2010. 17h30 - 19h30, 25ème séance du Séminaire « Enfermements, Justice et Libertés dans les sociétés contemporaines ». Université Paris 1. Centre d’histoire sociale du 20ème siècle. Avec Mme Sophie Desbruyères, conseillère d’insertion et de probation, secrétaire général du SNEPAP-FSU, « A propos de la réforme des services pénitentiaires d’insertion et de probation ».
- Discutante : M. Ludovic Fossey, vice-président chargé de l’application des peines, TGI de Créteil et M. Laurent Leriche, membre de la commission nationale « Justice » des Verts (sous réserve).
- Lieu : CHS 20ème siècle, 9 rue Malher, Paris 4ème, métro Saint-Paul (6ème étage).
- Ouvert à toutes et à tous, sans inscription -
Séance suivante
* Mardi 16 mars 2010, 17h30, 26ème séance, Mme Lucie Bony, doctorante en géographie et anthropologie à l’Université de Paris Ouest La Défense, « Prison et ordre urbain. Les quartiers pauvres au prisme du système pénitentiaire ».
- Discutant : M. Pascal Vion, directeur de la maison d’arrêt de Nanterre.
*** RÉFLEXIONS ET NOUVELLES ***
*** CHRONIQUE DE CHRISTIAN DEMONCHY ***
- 6. - L’ARBITRAIRE DE L’ARBITRAGE
FIGURE 1
Dans un rectangle de 6000 m2 évoluent 23 personnes avec un ballon. C’est un match de foot qui se déroule sans public avec deux équipes de onze joueurs amateurs et un arbitre chargé de faire respecter les règles du jeu.
Si l’enjeu du match est pour chaque équipe de gagner la partie en marquant plus de buts que l’équipe adverse, l’intérêt du sport est dans la manière de la gagner, ce qui implique des qualités spécifiques : adresse, rapidité, endurance, intelligence du jeu… Aucun dieu du foot n’a révélé et imposé des règles universelles et immuables qui garantissent à la fois la qualité du jeu et l’exercice d’un arbitrage infaillible. D’ailleurs, rien n’empêche ces joueurs amateurs de modifier les règles avant le début de la partie, par exemple la durée du match ou le nombre de joueurs et d’arbitres, dès lors qu’ils acceptent tous de jouer selon ces modifications. Les règles du jeu sont nécessairement arbitraires et la légitimité de cet arbitraire tient au consentement de tous les participants après concertation. C’est pourquoi les règles sont faites pour les joueurs, dans l’intérêt du sport. Les unes sont d’ordre technique, les autres sont d’ordre moral. Les premières réglementent le mode de progression vers le but par la position du ballon et des joueurs. L’arbitrage consiste alors à constater simplement un fait matériel, en l’occurrence une mauvaise position due à une erreur technique, et à donner le ballon à l’équipe adverse (touche, corner, hors-jeu). Les secondes interdisent certains gestes individuels. L’arbitrage ne consiste plus seulement à constater l’acte mais à juger l’acteur. Car s’il est parfois possible de mettre ce geste sur le compte d’une maladresse technique, il est plus souvent causé par la volonté de donner la priorité à l’enjeu, gagner coûte que coûte, au dépens du respect des règles et même, dans certains cas au risque de blesser un adversaire. C’est donc bien de la responsabilité morale du joueur qu’il s’agit. Mais comment la juger quand le fait de vouloir gagner, qui est la dynamique du jeu, peut être invoqué à chaque fois comme circonstance atténuante ? Il est convenu de tenir compte de la dangerosité du geste, parfois attestée par ses conséquences effectives, et de considérer comme circonstance aggravante une situation où l’intérêt de la transgression semble manifeste (proximité de la cage de but).
L’importance accordée à la morale sportive s’exprime par la grande variété des sanctions et l’impact parfois déterminant qu’elles peuvent avoir sur le résultat du match (coup franc, carton jaune, penalty, carton rouge ). En même temps, le choix de ces sanctions met d’autant plus en jeu la responsabilité de l’arbitre : un deuxième carton jaune à un joueur récidiviste signifie son exclusion définitive. A situations analogues, il est certain que tous les arbitres ne prennent pas la même décision et l’impartialité qu’on exige d’eux les engage à exercer leur libre arbitre.
Dans le cas présent, les joueurs ont confié leur arbitrage à un homme en tenue de footballeur, situé sur le terrain parmi eux. Cet arbitre de proximité accompagne les mouvements, cherche la meilleure position pour évaluer le jeu et l’enjeu et prend ses décisions dans le feu de l’action, condition indispensable pour ne pas perturber le rythme et la qualité du jeu. Spécialiste du flagrant délit, policier et juge à la fois, il siffle une irrégularité et indique la sanction dans la seconde qui suit. Il lui arrive aussi de ne pas siffler pour « laisser l’avantage » ou de ne pas voir une irrégularité. Tous les joueurs ont accepté l’arbitraire de son pouvoir car la rapidité de ses décisions s’accorde à la vivacité de leur jeu. Il fait partie de la communauté sportive formée le temps de la partie. Dans ce jeu collectif, l’arbitraire des règles et de l’arbitrage fait lien entre la responsabilité collective de ceux qui l’adoptent et la responsabilité individuelle de ceux qui s’y soumettent ou s’y opposent. Et la morale sportive est sauve dans tous les cas.
FIGURE 2
Dans un hexagone de 550000 km2, plusieurs millions de citoyens participent au jeu de la démocratie. C’est un jeu collectif où chacun a le pouvoir d’élaborer des règles de vie sociale applicables à tous et a le devoir de vivre avec les autres selon les règles communes en vigueur.
Cette équation politique serait impossible à résoudre si l’on n’y introduisait pas la seule règle consentie par tous, celle de l’arbitraire qui concède à une majorité le pouvoir d’établir les règles du jeu communes à tous et de confier à un arbitre institutionnel, la justice, la mission de juger et sanctionner les transgressions. La démocratie est fondée sur l’arbitraire concerté et consenti. Ce sont des choix politiques, donc décidés par l’arbitraire démocratique, qui déterminent, à un moment donné et jusqu’à nouvel ordre, les règles du jeu, ce qui est légal ou illégal, que telle infraction doit être sanctionnée plus sévèrement que telle autre et que tel type d’infracteurs doit être plus recherché que tel autre. Mais ces règles, pour nécessaires qu’elles soient aux citoyens, ne sont pas la finalité du jeu démocratique, elles ne doivent pas les réduire à un statut de justiciables. L’intérêt du jeu est la recherche d’un certain mode de vie sociale et la confrontation de différents projets de société. L’enjeu est de désigner l’équipe gagnante, celle dont le projet sera approuvé par une majorité, et qui sera mandatée pour édicter les nouvelles règles en vigueur jusqu’à la prochaine échéance. La démocratie est un jeu de sociétés, un jeu sans fin grâce à l’arbitraire de ses règles.
La justice pénale actuelle ne consiste pas à prêcher le droit du haut d’une chaire mais à prendre part au jeu de sociétés en s’intéressant à la vie sociale des justiciables pour juger leur responsabilité individuelle dans la transgression des règles (préméditation, circonstances atténuantes, influence du milieu…) et modifier par des sanctions leur vie et celle de leur entourage. Et c’est justement parce que les acteurs de cet arbitrage judiciaire doivent être préservés de toute pression extérieure qu’ils sont livrés à leur libre arbitre. Mais l’indépendance des acteurs judiciaires n’empêche pas, bien au contraire, l’évolution du mode d’arbitrage et de ses procédures, pour peu que ceux-ci soient décidés démocratiquement, l’important pour le jeu étant que ce qui a été décidé par les joueurs-citoyens soit respecté par eux-mêmes et par l’arbitrage qu’ils ont choisi. La justice humaine n’est pas infiniment juste, elle est nécessairement arbitraire.
FIGURE 3
Dans un hexagone de 550000 km2, plusieurs millions de spectateurs sont assis chez eux devant un écran de quelques décimètres carrés. Dans l’écran, un rectangle de 6000 m2 où évoluent un arbitre et 22 joueurs professionnels qui disputent le match de qualification pour la coupe du monde de football France-Irlande.
Le gigantisme du jeu vidéo couplé à la télé-réalité aurait pu révéler l’ampleur de l’enjeu financier pour les organisateurs si la Marseillaise ne l’avait pas opportunément transformé en enjeu national : la victoire ou la défaite de la France. Et quand les téléspectateurs sont à ce point convaincus que l’honneur de la Nation est entre les pieds de quelques joueurs qui ont l’immense responsabilité de les rendre fiers de leur identité nationale, ils ne peuvent qu’admettre ou même approuver leurs fabuleux salaires. Le fournisseur du jeu a compris depuis longtemps que pour accroître sa clientèle de spectateurs, à défaut de pouvoir agir sur la réalité du match, il devait perfectionner la vidéo afin de faire participer ses clients à la virtualité de l’événement. Prises de vue sous tous les angles, flash-back, ralentis, zooms, sont autant de moyens techniques sophistiqués que la régie utilise pour reconstituer à l’écran un match virtuel de qualité. Assis dans son fauteuil, le téléspectateur qui reçoit ces images et écoute les commentaires, est incité à se substituer à l’arbitre, d’autant que celui-ci est presque toujours hors-champ pendant les « effets spéciaux » de la vidéosurveillance braquée sur les joueurs. Totalement étranger à la communauté sportive formée sur le terrain par les joueurs et l’arbitre, il est investi par le jeu vidéo d’un pouvoir de jugement sur la télé-réalité.
Après tout, cela n’aurait guère d’importance si ce rôle restait virtuel. Mais la faute d’un joueur français, qui aurait pu changer le résultat du match si elle avait été vue par l’arbitre, a provoqué après-coup une intrusion intempestive du virtuel sur le réel. La communauté de téléspectateurs, constituée artificiellement par les médias et excitée par l’enjeu national, s’est déchaînée. La règle du « pas vu, pas pris » divisa l’opinion. Pour certains, la France avait gagné, et c’était là l’essentiel. Pour d’autres, cette victoire volée était une honte nationale. On en vit même prier pour que l’organisateur/fournisseur du jeu vidéo fasse rejouer le match (une manière, en somme, de moraliser l’enjeu économique ?). Au nom d’une justice idéale qui proscrirait l’arbitraire de l’arbitrage, ces juges virtuels auraient voulu imposer rétroactivement une nouvelle règle de jeu à une communauté sportive dans laquelle ils n’avaient aucune responsabilité !
Christian Demonchy
5 janvier 2010
*** LA POLITIQUE PÉNITENTIAIRE ***
- 7. - Conférence de presse de Michèle Alliot-Marie, ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés sur la politique pénitentiaire (18 janvier 2010).
Mesdames, Messieurs,La question pénitentiaire est une priorité pour la lutte contre la récidive, et donc la sécurité des Français. L'adoption par le Parlement de la loi pénitentiaire nous donne de nouveaux outils pour faire de la prison l'école de la lutte contre la récidive. Mais je l'ai dit lors des débats, et je le redis, la loi pénitentiaire ne règle pas tout. Pour moi l'action s'inscrit dans un cadre beaucoup plus vaste qui doit mobiliser tous les moyens disponibles et prendre en compte toutes les problématiques.
La problématique des conditions de détention et du développement des activités d'abord. Leur amélioration est nécessaire pour mieux préparer la réinsertion et donc prévenir la récidive. Elle demande de nouveaux outils. L'Etat a un rôle essentiel à jouer, j'y reviendrai. Mais l'Etat n'est pas le seul à pouvoir intervenir dans ce domaine. C'est pourquoi je tiens à saluer particulièrement l'initiative de Pierre Botton. Pierre Botton, vous être venu me voir pour me présenter votre projet des « prisons du cœur ». Je vous laisserai dans quelques minutes le présenter. Je suis sûre que vous convaincrez nos interlocuteurs comme vous avez su me convaincre. J'ai donc décidé de vous ouvrir les portes de la maison d'arrêt de Nanterre pour y expérimenter votre dispositif. Tout est mis en œuvre pour en faciliter la mise en œuvre. Dans quelques semaines, je viendrai sur place pour en évaluer avec vous les effets. Et, si elle s'avère positive, je suis prête à étendre cette expérience.
Le futur plan immobilier intègre le double objectif d'amélioration des conditions de détention, et des conditions de travail des personnels. 5 000 places supplémentaires seront créées, comme le Président de la République l'a annoncé. 12 300 places vétustes seront parallèlement fermées et remplacées par des places neuves. Une des alternatives du scenario initial prévoyait des établissements de 1 000 places : j'ai rejeté cette conception totalement déshumanisée de la prison. J'ai décidé qu'aucun établissement ne dépasserait une capacité de 700 places, avec une exception pour la rénovation de la maison d'arrêt de Paris-La-Santé, pour laquelle un premier projet datant de 2006 prévoyait une capacité de 1400 places que j'ai décidé de réduire à 1000. Pour effectuer ces remplacements, le premier plan inspiré par la RGPP recensait 83 structures devant fermer. J'ai réduit ce chiffre à une soixantaine. Le choix des établissements à fermer est dicté par la vétusté de ces sites, et par l'impossibilité d'y mettre en place la loi pénitentiaire ou les règles pénitentiaires européennes. Les fermetures interviendront majoritairement entre mi 2015 et 2017. Bien entendu les élus et les autorités locales seront informés bien en amont. Certains se sont d'ailleurs déjà manifestés pour évoquer la situation indigne de leur établissement (Colmar, Mulhouse, Orléans...). Avec le nouveau programme, en 2017, la France sera dotée de 68 000 places de prison, dont 35 200 de moins de 30 ans. Afin de répondre au plus vite au grave problème de l'inexécution des peines, nous allons d'abord ouvrir les places supplémentaires tout en procédant au remplacement progressif des places vétustes, qui nécessiteront des fermetures d'établissements. 18 établissements nouveaux ouvriront, dont 11 d'ici fin 2015. Les recherches de terrains ont débuté. Plusieurs sont même proches d'aboutir, dans certains cas comme Orléans ou le Haut-Rhin. Dans sa globalité, ce nouveau programme permettra de répondre aux prescriptions de la loi pénitentiaire
Il garantira l'encellulement individuel : la taille des cellules sera fixée à 8,5 m2, ce qui rend impossible le doublement. Il permettra le développement des activités : 2,5 m2 par détenus seront réservés aux activités contre 0,7 m2 dans le programme actuel. L'objectif est de proposer 5 heures d'activité par jour à chaque détenu.
Il assurera le maintien des liens familiaux : chaque établissement se verra doté d'une unité de vie familiale ou d'un parloir familial, ce qui permettra à chaque détenu de bénéficier d'un parloir de ce type par trimestre comme le prévoit la loi.
Les cours de promenade devront être également plus attrayantes et il sera mis fin au « tout béton » qui gouverne le programme actuel.
Il permettra enfin l'application des régimes différenciés consacrés par la loi : dans le respect de l'ensemble des droits et devoirs reconnus aux détenus, il s'agit après une évaluation de leur caractéristique de leur proposer un régime de détention adapté à leur personnalité
Ce nouveau programme immobilier sera enfin l'occasion de développer un nouveau concept d'établissement : les établissements à réinsertion active (ERA). La mise en place d'une politique pénitentiaire moderne reposant sur l'évaluation dès l'entrée, impose de diversifier les modes de prise en charge. Elle nous conduit à créer des établissements favorisant la prévention de la récidive pour les détenus pouvant d'emblée s'impliquer dans ce type de programme. Je souhaite également expérimenter un type d'établissement ou de quartier qui reproduirait le plus possible les conditions de vie à l'extérieur afin de faciliter la resocialisation : liberté de circulation, accès aux ateliers sans accompagnement...
La prise en charge des détenus présentant des troubles mentaux est une problématique spécifique. Elle impose que le programme de création des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) soit mené à son terme le plus rapidement possible. L'unité de Lyon ouvrira cette année. L'unité de Rennes est prévue pour juin 2011. Une évaluation de ces deux premières unités était prévue avant de lancer la construction des suivantes. Devant l'urgence et la gravité de la question de la prise en charge de ces détenus souffrant de troubles mentaux, nous avons demandé avec Roselyne Bachelot-Narquin que les constructions démarrent avant même cette évaluation. Nous avons obtenu qu'une UHSA au moins par région pénitentiaire soit construite sans attendre.
Autre problématique devant nous mobiliser : la nécessité de toujours mieux prévenir les suicides. Les suicides en prison sont des drames humains, pas des secrets d'Etat. Il n'y a aucune raison de les cacher. Je vais donc, comme je m'y étais engagée vous en donner le nombre. Mais vous me permettrez de dire que ce qui importe le plus, c'est de tout faire pour les prévenir. En 2009, nous avons déploré 115 décès en détention (décédés en cellule ou à l'hôpital des suites de la tentative de suicide) contre 109 en 2008. Le chiffre total des suicidés sous écrou, c'est-à-dire non seulement en détention, mais aussi en semi-liberté, en permission, en hospitalisation, ou sous surveillance électronique, est de 122 contre 115 en 2008. Ces chiffres demeurent dramatiques. Pour autant, nous avons pu constater une diminution depuis la mise en place du plan d'action que j'ai décidée au mois d'août. Entre le 1er janvier et le 31 août, 84 suicides ont eu lieu. 31, entre le 31 août et le 31 décembre, ce qui représente en moyenne trois suicides de moins par mois. J'y vois l'effet d'une appropriation des mesures et d'une mobilisation forte du personnel sous l'égide du professeur Terra qui préside le groupe de suivi. En 2010, je souhaite que nous achevions l'application du plan d'action : toutes les mesures ayant fait l'objet d'une expérimentation seront généralisées si l'évaluation est favorable.
Nous allons nous donner les moyens de favoriser les programmes d'activités en détention en augmentant le nombre d'heure d'activité par détenus ainsi que la surface consacrée aux activités. Nous allons également renforcer nos liens avec le ministère de la Santé, en recherchant une meilleure implication des médecins sur le terrain et en menant une étude conjointe sur le suicide en milieu carcéral et le suicide en milieu libre.
L'amélioration des conditions de détention va de pair avec celle des conditions de travail des personnels de l'administration pénitentiaire. Ces personnels font un travail remarquable dans des conditions que nous savons tous très difficiles.
La violence au sein des établissements pénitentiaires ne saurait être une fatalité, un risque du métier. Pour mieux la prévenir et l'anticiper, nous devons la comprendre et l'intégrer comme une donnée inhérente au public pris en charge (53 % des condamnés le sont pour des actes de violence). A cette fin, j'ai lancé le 21 décembre dernier un groupe de travail, réunissant la direction de l'administration pénitentiaire et les services déconcentrés, des personnalités qualifiées et les organisations syndicales pénitentiaires. Ce groupe, chargé de me faire des propositions concrètes, doit rendre ses conclusions au printemps prochain.
Mesdames et messieurs, Vous le voyez, la politique pénitentiaire ne s'arrête pas au vote d'une loi. Elle exige un engagement quotidien et dans tous les domaines pour faire véritablement de la prison l'école de la lutte contre la récidive. J'y suis bien déterminée, comme l'ensemble de l'administration pénitentiaire.
______________________________* Remarque de Pierre V. Tournier : Collecte sur les suicides, il nous faut insister !
Dans ACP n°169 du 14 décembre 2009, nous écrivions ceci : « En annexe d’une note publiée par l’Observatoire national de la délinquance (OND), intitulée Infractions et réponses pénales. Chronique de la naissance annoncée d’un Nouvel Observatoire, nous avons fait des propositions en matière d’information sur la question des suicides sous écrou [...]. Communiquées à la direction de l’administration pénitentiaire, ces propositions n’ont fait l’objet d’aucun commentaire, ni approbation, ni critique : rien. Mais c’est une habitude. L’expérience aidant, il nous en faudrait plus pour nous décourager. […] ».
Comme le souligne, Erich Incyan dans un article de Médiapart - dans lequel il rappelle notre point de vue -, la Garde des Sceaux n’a rien dit sur cette question difficile de la collecte des données. Rien. Quelle étrange façon de vouloir mener sur le sujet une politique de la transparence ! Nous allons donc insister en lui adressant de nouveau notre note. Nous allons aussi la faire parvenir à M. Jean-Amédée Lathoud, nouveau directeur de l’adminis-tration pénitentiaire. Nous comptons aussi aborder ce problème dans le cadre du groupe de travail mis en place - sur notre proposition - sur l’extension des compétences de l’Observatoire nationale de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Le groupe se réunit pour la première fois le lundi 25 janvier à l’INHESJ sous la présidence de Christophe Soullez, responsable de l’ONDRP.
A suivre…
Référence : PVT, Infractions et réponses pénales. Chronique de la naissance annoncée d’un Nouvel Observatoire, Observatoire national de la délinquance (OND), Débat, n°2, décembre 2009, 11 pages.
*** NOMINATIONS ***
- 8. - Le conseil des ministres a adopté les mesures individuelles suivantes
* Sur proposition de la ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés : - Mme Maryvonne CAILLIBOTTE, première substitute à l’administration centrale du ministère de la justice et des libertés, est nommée directrice des affaires criminelles et des grâces, à compter du 1er mars 2010 ;
- M. François FALLETTI, procureur général près la cour d’appel d’Aix-en-Provence, est nommé procureur général près la cour d’appel de Paris ;
- M. Jean-Marie HUET, directeur des affaires criminelles et des grâces, est nommé procureur général près la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;
* Sur proposition du ministre des affaires étrangères et européennes :
- Mme Catherine BRECHIGNAC, directrice de recherches, est nommée ambassadrice déléguée à la science, la technologie et l’innovation.
* Sur proposition de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche :
- M. Alain FUCHS, professeur des universités, est nommé président du Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
*** DÉVIANCES ET CITOYENNETÉ ***
Avertissement. La rédaction d’ACP ne partage pas nécessairement le positionnement politique des personnes physiques ou morales citées dans ces rubriques. Par la diffusion de ces informations, elle souhaite simplement favoriser le débat d’idées dans le champ pénal, au delà des travaux et manifestions scientifiques que cet hebdomadaire a vocation à faire connaître.
*** DES MAINTENANT EN EUROPE ***
« Le courage en politique n’est pas toujours perdant »
- 9. – Ayant tenu son Assemblée générale fondatrice, le samedi 16 janvier à Paris (Cité Saint Martin, 4ème) l’association « DES Maintenant en Europe » est désormais constituée.
L’Assemblée avait reçu des messages de sympathie de Robert Badinter et Louis Mermaz sénateurs, d’Elisabeth Guigou et Marylise Lebranchu, députées anciennes Garde des Sceaux, de Martine Aubry, maire de Lille et Première secrétaire du Parti Socialiste et de Bertrand Delanoë, Maire de Paris.
Les statuts proposés ont été adoptés par l’Assemblée générale. Nous en rappelons les trois premiers articles :
Article 1er - Il est fondé entre les adhérents aux présents statuts une association, de droit français, régie par la loi du 1er juillet 1901 et le décret du 16 août 1901 ayant pour nom Déviances Et Social-démocratie Maintenant en Europe, dénommée ci-après l'Association.
Art. 2 - L’Association inscrit son action dans la suite du Club informel DES Maintenant en Europe fondé par Pierre V. Tournier, à Paris le 28 octobre 2004, dans la mouvance de la social-démocratie européenne. L’association n’en est pas moins indépendante de toute organisation partisane.
Art. 3 - Comme les actions menées par le club informel l’ont illustré depuis 2004 (voir annexe « Raisons d’être, façons d’agir »), l’association a pour vocation de rassembler les progressistes qui, pour des raisons professionnelles et/ou militantes s'intéressent à la question des déviances, de la délinquance et de la criminalité et aux réponses que la société doit lui apporter : prévention, aide aux victimes, poursuites à l’égard des auteurs, alternatives aux poursuites, prononcé des mesures et des sanctions, modalités d’exécution des unes et des autres en détention comme dans la communauté.
L’association agit, dans son champ de compétence, pour favoriser la mise en œuvre politique, résolument réformiste, des réflexions de ses membres, de leur action sur le terrain, de leur engagement de citoyen.
… / …
Les membres fondateurs du Conseil : Blisko Serge, médecin, député de Paris (10ème), membre du groupe socialiste, membre de la commission des lois, président du groupe d’étude sur les prisons de l’Assemblée nationale, Chenivesse Sandrine, docteur en anthropologie religieuse, enseignante à Science Po, Cugno Alain, docteur d’Etat ès lettres et sciences humaines, professeur agrégé de philosophie, retraité, Debarbieux Eric, docteur en sciences de l’éducation, professeur à l’Universités Bordeaux 2, directeur de l’Observatoire international de la violence scolaire, membre du conseil d’orientation de l’ONDRP, Dejenne Jean-Michel, directeur d’établissement pénitentiaire, Dériot Daniel, travailleur social dans un centre d'urgence d'Emmaüs (trésorier adjoint), Jouannot Michel, visiteur de prison, membre de l’ANVP, Kania Eric, psychiatre, SMPR des Baumettes, Marseille, Lhomme-Tournier Edith, agent commercial, ThyssenKrupp Mannex (trésorière), Marlière Eric, docteur en sociologie, Méheust Pierre, professeur certifié d’histoire, ancien président du GENEPI, Noël Etienne, avocat au Barreau de Rouen, Pélissier Pierre, magistrat, conseiller à la Cour d‘appel de Versailles, ancien président de l’ANJAP, Pernin Christiane, présidente d’une association d’aide aux familles de personnes détenues, Blois, Piednoir Julien, docteur en droit, en Ph D en criminologie, Raimbourg Dominique, avocat, député de Loire Atlantique, membre du groupe socialiste, membre de la commission des lois, vice-président du groupe d’étude sur les prisons de l’Assemblée nationale, Tintoni Thierry, capitaine de police, Tournier Pierre V., docteur en démographie, directeur de recherches au CNRS (président), Zoummeroff Philippe, docteur ingénieur, industriel en retraite.
La cotisation annuelle a été fixée à 20€ (10€ pour les étudiants et les personnes à la recherche d’un emploi).
Le siège social a été fixé au domicile de Pierre V. Tournier : 43, rue Guy Môquet 75017 PARIS. Tél Fax Rép. 01 42 63 45 04.
Bulletin d’adhésion et compte rendu de l’Assemblée générale peuvent vous être adréssés sur simple demande à pierre-victor.tournier@ wanadoo.fr
* Prochaine réunion trimestrielle (publique) du conseil : samedi 10 avril 2010 de 10h à 13h. Cité Saint-Martin, 4, rue de l’Arsenal, Paris 4ème, salle Van Gogh, métro Bastille.
*** ATELIER PHILOSOPHIQUE ***
- 10. - La séance inaugurale de l’Atelier philosophique « Crime, Justice des hommes et Christianisme », animée par Alain Cugno, philosophe, Pierre V. Tournier, démographe du champ pénal et Sandrine Chenivesse, anthropologue des religions s’est déroulée, samedi 9 janvier à la Cité Saint-Martin (Paris 4ème ).
La prochaine rencontre se tiendra le samedi 27 mars 2010 de 10h à 13h,
Cité Saint-Martin, 4, rue de l’Arsenal, Paris 4ème, salle Van Gogh, métro Bastille.
Nous vous proposerons de dialoguer autour des 12 mots suivants : « Crime - infraction - déviance - erreur - faute - mal - perversion - péché / responsabilité - sanction - pardon - rédemption. »
Séance animée par Sandrine Chenivesse, propos liminaires d’Alain Cugno.
Nous donnons infra une synthèse qu’Alain Cugno a bien voulu nous transmettre de sa conférence du 9 janvier.
« Pertinence du christianisme, l’invention de la laïcité », par Alain Cugno
- L’invention de la laïcité
- Le christianisme est multiforme : c’est une auberge espagnole, peut-être n’a-t-il pas même de contenu assignable. On aurait tort cependant de conclure à son inconsistance logique. C’est au contraire ce qui fait sa plus grande force. Simplement, le lieu de sa cohérence n’est pas disponible.
- Il est aussi, pourrait-on dire, polyédrique : quelque soit la base sur laquelle on le fait reposer, il tient. Rien n’est plus facile que de prétendre avoir atteint ‘l’essence de christianisme’, ça marche à tous les coups. En manière de plaisanterie, j’avais dit à Sandrine « sauf peut-être la fraise des bois. » Et bien, par le néant des créatures chez Maître Eckhart, qui lui choisit le brin d’herbe ou la mouche, ça marcherait aussi.
- C’est là également que l’on peut rattacher le christianisme en son essence même, à la rationalité herméneutique, i-e la seule rationalité qui puisse tenir dans le champ des cultures diverses : ni instrumentale, ni communicationnelle, elle ne pense avoir compris quelque chose que lorsqu’elle peut l’effectuer dans son propre champ en en activant des possibilités qui n’y étaient pas encore actives.
- Cette rationalité a été inventée d’une part par l’herméneutique biblique (comment tenir pour le même texte, une bible en hébreu, en latin, en grec, etc. – question éminemment augustinienne) et d’autre part par la tâche logique impossible qu’est penser la Trinité (là aussi, Augustin et le De Trinitate dont est sortie l’anthropologie moderne, l’homme conçu à l’image de Dieu : le Père = la mémoire ; le Fils = l’intelligence ; l’Esprit = la volonté).
- Cependant, ou plutôt et au contraire, par là même le christianisme donne consistance à quelques traits fondamentaux : le premier étant l’universalité. Cf. Alain Badiou. Saint Paul, la fondation de l’universalisme1 : « s’il y a eu un événement, et si la vérité consiste à le déclarer et ensuite à être fidèle à cette déclaration, il s’ensuit deux conséquences […] la vérité étant événementielle, ou de l’ordre de ce qui advient, alors elle est singulière […] Ensuite, la vérité étant inscrite à partir d’une déclaration subjective, aucun sous-ensemble préconstitué ne la supporte. »
- Le second est conséquence immédiate du premier : « il n’y a ni Juif ni Grec, il n’y a ni esclave ni hommes libres, il n’y a ni homme ni femme »2 - c’est-à-dire le refus de toute identité qui ne soit celle d’un « vous ne faites qu’un » en Christ, i-e la singularité absolue.
- A mes yeux cela fait écho à la définition du citoyen français par la Constituante : « art.1 est français l’apatride, art.2 est français celui qui est né en France de parents qui y sont eux-mêmes nés ».
- Mais aussi à la position de l’Individu comme réalité suprême, indépassable, inestimable. Prendre cela pour de l’individualisme serait comique. On se trouverait plutôt conduit vers des pensées aussi opposées que celles de Hegel et de Kierkegaard, mais profondément accordées sur ce point : la singularité comme vérité de l’opposition entre universel et particulier chez l’un ; le moi comme ouverture de la possibilité de désespérer – et donc de ne pas désespérer chez l’autre. Autrement dit la possibilité d’ouvrir au plus près l’infini.
- Par là même, le christianisme est, comme il a été dit par Marcel Gauchet, la religion de la sortie de la religion. C’est cela, l’invention de la laïcité (Cf. Hegel, dans les Principes de la philosophie du droit : « L’Etat moderne sera chrétien, c’est-à-dire laïc »). L’affirmation que la réalité ultime est ici : il n’y a pas d’arrière monde, « le Royaume est parmi vous ».
- La période contemporaine
- Il me semble que nous sommes en train de vivre une sorte de pourrissement du christianisme. Toute époque fait une contresens plus ou moins lourd sur ce qui la fait vivre. Il est probable que le contresens précédent a été d’interpréter la transcendance en terme de sacré – et que le contresens contemporain est, à l’inverse, de penser à une disparition de la transcendance.
- J’y vois l’identité de deux propositions sarkozystes : « Travailler plus pour gagner plus » et ‘Le curé a plus de choses à dire sur le sens de la vie que l’instituteur’. Seul celui qui a perdu le sens de la transcendance (la vie a des enjeux infinis) peut penser que le sacré puisse être mis à profit pour se maintenir dans la vie, apprivoisé pour se sentir mieux. Il faudrait remplacer la ‘laïcité positive’ (que chacun y aille de sa particularité religieuse, puisque tout ça c’est des histoires – exactement l’opium du peuple3) par ‘l’hospitalité’ (Jean-Michel Belorgey : « Qu’avez-vous à nous apprendre que nous ne savons pas ? »)
- J’y vois aussi la source de la victimisation comme christologie inversée : la victime innocente doit être toute puissante, mais non pas comme ressuscitée par une puissance qui n’est pas la sienne – au contraire en tant qu’on la maintient dans son abaissement.
- Le mal
- Par rapport au mal, l’entrée que le christianisme donne est fondamentalement juive. Le livre de Job. L’intelligible inintelligibilité du mal. Il y a un contresens généralement fait sur ce livre, et même par Paul Ricœur : la pointe n’est pas que YHWH accepte d’être mis en accusation, mais bien au contraire qu’il le refuse. L’argumentation de Job est extrêmement fine et double : ‘qu’est-ce qui te prends de t’acharner sur moi, alors que tu m’as inventé et tissé au sein de ma mère ? qu’est-ce qui te prends de t’en prendre à moi, toi qui es le Puissant, et moi qui ne suis rien ? Tu ne vois pas que dans ces conditions tu t’en prends à toi-même ?’ Or, si YHWH envoie promener les amis de Job qui tentent de rationaliser le malheur de Job (‘tu as bien dû commettre quelque méfait’) il envoie, et extrêmement violemment, balader Job lui-même : « Quel est celui-là qui brouille mes conseils par des propos dénués de sens ? » Ensuite, il refuse de se justifier (« Où étais-tu quand je fondais la terre ? ») et enfin il reprend tous les chefs d’accusation de Job contre lui pour s’en faire gloire. Et c’est le moment où Job se repend. Il se repend non pas d’une faute qu’il aurait commise, mais de s’être plaint. Il retire sa plainte, et c’est de ce retrait (et non de ses accusations) que YHWH dit de Job qu’il a bien parlé de lui. Mais Job dit aussi qu’il jubile et éclate de joie, parce qu’il a vu son Défenseur, il a vu YHWH. 1°) Job est innocent. S’il se repend, ce n’est pas d’une faute qu’il aurait pu commettre mais seulement d’avoir porté plainte. 2°) Pourtant le moment où Job dresse un acte d’accusation contre Dieu est décisif, puisque c’est cette audace qui « annonce sa délivrance » et permet d’affirmer : « je le verrai de mes yeux ». 3°) Au moment où Job va bien parler de YHWH il dit : « Je ne te connaissais que par ouï-dire, mais maintenant mes yeux t’ont vu. Aussi je retire mes paroles, je me repens sur la poussière et sur la cendre. » Or il n’a rien vu, d’une certaine façon YHWH s’est tu, puisqu’il n’a parlé que pour refuser de parler. Et pourtant c’est comme s’il avait pris la parole, comme si au fond il avait dit : ‘Tu ne peux rien contre le mal car c’est en termes de puissance qu’il faudrait s’adresser à lui, or il est prodigieusement puissant. Si quelqu’un peut affronter le mal, ce n’est pas toi mais moi, YHWH’. Libération : ‘Tu n’es pas responsable du mal, tu n’as pas à l’affronter ; si quelqu’un doit le faire, c’est moi, le Tout-Puissant. Quant à toi lâche prise.’ Où encore, la seule manière de lutter contre le mal (la mort), c’est de vivre.
- Quant à la compréhension du crime et de la justice (des hommes) sur des bases semblables, il faudrait d’une part analyser les différences entre erreur, faute et péché. L’élément déterminant étant la formule de Kierkegaard, le contraire du péché, ce n’est pas la vertu, mais la foi. Il faudrait d’autre part, et là les bases sont particulièrement difficiles à utiliser, comprendre la position du politique (précisément comme puissance). Machiavel étant sûrement la ressource la plus sûre.
Alain Cugno
*** VARIA ***
- 11. – LYON. 6 Mars 2009. « Bouleversements et compromis du soin psychique dans la clinique contemporaine ». Rencontre organisée par « Sauvons la clinique ».
- Lieu : Faculté de médecine Grange Blanche, 8 avenue Rockefeller, 69008 LYON
Le mouvement « Sauvons La Clinique Lyon » propose d'organiser des rencontres régulières permettant aux professionnels du soin psychique de se réunir pour partager et penser les bouleversements et les évolutions de leurs pratiques de terrain, afin de dynamiser et de renforcer une conception et une pratique clinique soucieuse de l'humain. Nous resterons attentifs au fait que le plus de champs de pratiques puissent être représentés tout au long de ces journées.
Ainsi ces rencontres se dérouleront selon deux axes d'intervention : des conférences plénières d'une part et des ateliers thématiques d'autre part.
Les intervenants qui souhaitent participer aux ateliers peuvent dès maintenant répondre à l'appel à Communication en envoyant un résumé de 30 lignes maximum avant le 4 février 2010. L'ensemble des échanges lors des ateliers sera synthétisé et retransmis lors de la séance plénière, ainsi que par un compte rendu général à l'adresse des professionnels mobilisés par cette dynamique. Ces journées sont rigoureusement centrées sur les échanges, la réflexion et le débat. Participation aux frais 5€
______________________________ ______________________________ ____________
- 12. - PARIS. Jeudi 28 janvier 2010. 17h30. « L’indépendance est-elle soluble dans le management ? Ou comment faire vivre, en juridiction, l'article 6 de la Convention européenne sur le droit à un juge indépendant et impartial ? Débat organisé par FO Syndicat de National des Magistrats, le Syndicat de la Magistrature et l'Union Syndicale des Magistrats.
- Lieu : Palais de Justice de Paris
Animateur modérateur : Emmanuel Jeuland, professeur de droit privé à l'Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne.
1 • De l'indépendance et du juge naturel en démocratie, par Dominique Rousseau, professeur à l 'Université de Montpellier 1, membre de l'institut universitaire de France, membre du CSM 2002-2006.
2 • L'exception française, par Noël Mamère, avocat, député Vert de la Gironde et maire de Bègles
3 • L'exemple allemand, par Hans Ernst Böttcher, magistrat président du Tribunal de Grande Instance de Luebeck
4 • L'exemple espagnol et les standards européens, par Carlos Gomez, président de la Cour d'Appel (Audiencia Provincial ) des Baléares, expert auprès du Conseil de l'Europe
5 • L'avenir du juge naturel dans les cours constitutionnelles, par Paul Martens, président de la Cour constitutionnel de Belgique
*** INTERNATIONAL ***
- 13. – Appel à contributions / Call for contributions : Violences juvéniles sous expertise(s), XIXe-XXIe siècles / Expertise and juvenile violence, 19th-21st century.
* Ouvrage coordonné par Aurore François, Veerle Massin et David Niget, publié en novembre 2010 aux Presses universitaires de Louvain.
Dans la construction historique du problème social que constitue la violence juvénile, que celle-ci soit exercée ou subie, le rôle de l’expertise est primordial. La violence, phénomène intime et social, étroitement associé avec l’état de jeunesse, oscille entre l’objectivité de ses manifestations et la subjectivité de sa perception. Elle se mesure à l’aune de son énoncé dans la sphère publique. L’expert, agissant au cœur ou à la lisière du système institutionnel de protection de la jeunesse, peut être celui qui recueille cette expression et celui qui la met en forme. Ainsi, l’expérience de la violence chez les jeunes est médiatisée par les formes de discours savants que produisent les experts.
Les experts ont très tôt investi cette question de la violence. Dès le XIXe siècle, la médecine légale épaule la justice en cherchant à en identifier les traces corporelles. Puis, au XXe siècle, une expertise diversifiée contribue largement à l’extension de la définition de la violence, passant du visible à l’invisible, de la violence physique à la violence psychique, voire même à la violence symbolique. Les experts dépassent alors la posture du simple diagnostic pour investir le champ du traitement de la violence, s’inscrivant dès lors dans une démarche de soin et de réhabilitation sociale.
Cette expertise, avatar de la modernité rationnalisatrice, s’est progressivement organisée dans le champ social au XIXe siècle, auprès de la justice en particulier, au point d’occuper, au XXe siècle, une position dominante dans le champ de la protection de la jeunesse. Médecins, psychiatres, puis psychologues, pédagogues, sociologues et anthropologues ont investi la question de la jeunesse irrégulière, contribuant ainsi à la définition d’une population-cible pour les politiques publiques.
L’expertise se présente comme une pratique sociale et professionnelle issue d’un savoir scientifique. Son intervention relève d’abord de l’identification, de la reconnaissance de phénomènes singuliers, se poursuit par une volonté classificatoire et étiologique et se prolonge par une proposition thérapeutique, prophylactique, orientant la décision de l’institution commanditaire. Mais cette autorité tirée d’une supposée objectivité scientifique produit en retour, sur les objets et les populations qu’elle veut étudier, des formes de singularisation, d’assignation, dont peuvent résulter des processus de stigmatisation individuelle ou de construction de problèmes sociaux. En outre, l’historiographie de l’expertise a montré comment les discours savants procédaient de manière paradoxale pour asseoir leur légitimité : complexifiant à l’envi les objets étudiés, à travers une nosographie parfois absconse, ils s’enracinent aussi dans la vulgate du sens commun, reproduisant sous d’autres formes des figures stéréotypées, agençant subtilement science et doxa, autorité technocratique et légitimation via l’opinion publique.
Ce savoir expert ainsi constitué en instrument de pouvoir, même s’il reste soumis à d’autres formes d’autorité (la justice notamment), fonctionne, comme l’a montré Michel Foucault, en prélevant de l’information sur une population donnée, puis en restituant ce savoir sous la forme d’un pouvoir qui s’impose à ces populations. Ian Hacking indique que cette pratique analytique et classificatoire est la conséquence d’une volonté de contrôle agissant à couvert, où l’action sur le corps social apparaît finalement être une conséquence de la classification, alors même qu’elle en est la cause. On peut donc suggérer, à la suite de Pierre Bourdieu, que cette opération expertale relève de la violence symbolique, processus dont la performance tient au fait que les acteurs n’ont pas conscience de la contrainte qui pèse sur eux, ayant incorporé le discours de l’expertise à leur propre identité. Ainsi, nous devons considérer à la fois la violence réifiée par l’expertise et la violence exercée par l’action de l’expertise. Cependant, l’historiographie de ces vingt dernières années a montré comment ces processus de classement rencontraient les résistances des acteurs, suscitaient des tentatives de subversion, de contournement, et constituaient toujours, malgré l’inégale répartition du capital symbolique, des sites de négociation dans l’élaboration des normes.
Sur le plan théorique, plusieurs questions transversales méritent d’être soulevées :
- L’expertise fonctionne comme compétence liée à une spécialisation, relevant de la technocratisation de l’action publique notamment. Mais elle tire également sa légitimité de son extériorité : en important un savoir exogène à un champ donné, elle entend conférer distance et objectivité. Entre compétence et extériorité, existe-t-il des tensions, et peut-on tenter une écologie de l’expertise ?
- L’expert est-il un entrepreneur de morale ? Si morale et vérité ont longtemps été synonymes, la laïcisation du savoir a théoriquement scindé ces deux concepts. La morale ne persiste-t-elle pas cependant à irriguer les savoirs experts, notamment dans le domaine de la protection de la jeunesse ?
- L’expertise a contribué à forger un nouveau discours sur le risque et sa gestion par des procédés de gouvernement, rendant la figure de l’expert d’autant plus ambiguë. L’expert est-il un savant, travaillant sur des faits objectifs, ou un oracle, dont la fonction prédictive, et par là même spéculative, est devenue primordiale ?
- L’expertise, largement entrée sur la scène du droit et de la justice, présente des traits apparemment contradictoires avec un droit conçu comme constitutif de l’espace public, à travers lequel s’exerce la citoyenneté, puisqu’elle fonctionne sur un mode technocratique et se présente comme une autorité non délibérative. Dès lors, l’expertise est-elle compatible avec le droit libéral ?
Sur le plan thématique, plusieurs propositions peuvent être suggérées, sans exclusive :
- Quelle est l’histoire de la circulation des modèles de l’expertise, à l’échelle nationale et internationale ? Si les premiers experts entrent en scène au sein des réseaux philanthropiques du XIXe siècle, la professionnalisation des organisations est rapide, avec la tenue de congrès internationaux dès la fin du siècle, et la consécration de l’expertise au XXe siècle par les organisations internationales en genèse (BIT d’abord, puis SDN, et ONU principalement). Quel rôle ont joué ces différentes structures dans la reconnaissance et le fonctionnement de l’expertise ? Quels transferts culturels ont-elles permis, ou quelles résistances nationales ont-elles suscité ? Peut-on affirmer que le langage expertal est devenu l’idiome hégémonique de ces organisations transnationales ?
- L’ouvrage consacrera un volet aux professions de l’expertise auprès de la jeunesse en difficulté. Qui sont ces experts ? Quelle est leur formation ? Quels facteurs ont permis d’élever la maîtrise d’une discipline au rang de savoir expertal, légitimant l’intervention de ses représentants dans le processus décisionnel ? Existe-t-il une déontologie codifiée spécifique à chaque domaine d’intervention ?
- Les institutions de l’expertise seront, elles aussi, l’objet d’une attention particulière. Quel est le rôle des institutions de prise en charge (maisons de correction, orphelinats, institutions médico-pédagogiques, etc.) dans l’épanouissement des savoirs experts ? Dans quelle mesure ont-elles favorisé ces pratiques expertales, notamment en se spécialisant ? L’expertise a-t-elle été mobilisée comme argument de légitimation, ou comme outil de captation de populations sur le marché de la rééducation ?
- Que sait-on aujourd’hui de ces populations soumises à l’expertise ou qui la sollicitent ? Existe-t-il des profils récurrents, en fonction des classes d’âge, du genre, de l’origine ethnique, de la classe sociale, etc. ? Comment décrire leur posture face au discours expertal, entre acceptation et rejet, instrumentalisation et soumission, méfiance et crédulité ?
- Une grande part de l’expertise autour de la jeunesse en difficulté est mobilisée par la justice des mineurs. Comment fonctionnent expertise et justice, lors des différentes étapes de l’intervention judiciaire : rôle de l’expertise dans l’élaboration de la preuve, dans le diagnostic, dans le pronostic, dans la recommandation de traitement judiciaire ? Comment les différents experts intervenant au sein du tribunal pour enfants concilient-ils leurs intérêts ; fonctionnent-ils en symbiose, dans le conflit, selon des formes d’instrumentalisation réciproques ? Enfin, quelle est l’incidence de l’expertise sur l’aire d’intervention de la justice ? L’enfance, comme paradigme générique du comportement humain, comme âge de la vie à protéger, n’a-t-elle pas permis à la justice d’étendre ses prérogatives ?
- Qu’en est-il des savoirs de l’expertise ? Si la légitimité de l’expert repose sur les savoirs sur lesquels il s’appuie, une bonne part de son activité reste empreinte d’empirisme. Ces savoirs se nourrissant de leur terrain d’action ne présentent-ils pas des biais tautologiques, les populations observées étant déjà stigmatisées ? La complexité nosographique de l’expertise ne donne-t-elle pas souvent lieu à une standardisation des étiologies et des préconisations de traitement ? Existe-t-il des concurrences entre les savoirs experts ? Quelle est la compatibilité des différents savoirs mobilisés, par exemple, entre socio-genèse des violences juvéniles et psychologisation des approches ?
- Que dire, enfin, de l’expertise dans l’espace public? Comment expertise et discours médiatique se croisent-ils ? Les experts participent-ils à la fabrique de l’opinion ? Existe-t-il un rôle politique de l’expertise, qui abandonne dès lors sa posture de retrait scientifique au profit de l’intervention publique ?
Le comité scientifique de cette publication est composé de chercheurs issus de différents horizons disciplinaires et géographiques :
- Ludivine Bantigny, historienne, Maître de conférence à l’Université de Rouen
- Louise Bienvenue, historienne, Professeur à l’Université de Sherbrooke
- Frédéric Chauvaud, historien, Professeur à l’Université de Poitiers
- Michel Chauvière, sociologue, Directeur de recherche au CNRS
- Jenneke Christiaens, criminologue, Professeur à la Vrije Universiteit Brussel
- Marie-Sylvie Dupont-Bouchat, historienne, Professeur émérite à l’Université de Louvain
- Tamara Myers, historienne, Professeur à l’University of British Columbia
- Martine Ruchat, historienne, Professeur à l’Université de Genève
Les textes pourront être remis en français ou en anglais et seront publiés dans leur langue d’origine.
Le format des textes respectera la limite haute de 40.000 signes, espaces et notes incluses.
Voici les étapes de cette publication :
- Les propositions de texte, rédigées en français ou en anglais, comprenant 1 page de résumé (incluant une problématique, une présentation des sources exploitées, ainsi qu’une bibliographie sommaire) et un bref CV, sont attendues pour le 15 février 2010, à l’adresse suivante : expertises@uclouvain.be
- Le choix des propositions retenues sera signifié dès le 18 février 2010.
- Les textes sont attendus pour le 3 mai 2010. Ils seront évalués selon la procédure courante : double lecture à l’aveugle.
- Le comité scientifique remettra un avis sur les textes pour le 1er juillet 2010. Nous tenons à préciser que la soumission d’un texte ne garantit pas sa publication.
- Le retour définitif des textes amendés est fixé au 1er septembre 2010.
* Contact : expertises@uclouvain.be
______________________________ ______________________________ _____________
- 14. - Interlaken (Suisse). 3-5 mars 2010. « Justice pénale, des ambitions aux résultats ». Congrès annuel du Groupe suisse de criminologie.
*** FROM CENTRE FOR PRISON STUDIES, LONDON ***
- 15. – Information from Helen Fair, Research Associate, International Centre for Prison Studies, School of Law King's College London.
More prisons are not the answerhttp://www.guardian.co.uk/
Schwarzenegger's deficient thinking (US)
http://www.guardian.co.uk/
Male inmate illiteracy 'shocking' (Scotland)
http://news.bbc.co.uk/1/hi/
Family hope inquest will end prison murders
http://www.independent.co.uk/
Prison may not be a perfect solution, but it's all we have
http://www.telegraph.co.uk/
3 Inmates Dead After Prison Riot in Brazil
http://www.foxnews.com/story/
Mentally ill offenders too often sent to jail (Australia)
http://www.abc.net.au/news/
Ministers press Libya over detentions
http://www.guardian.co.uk/
Our prisons are in crisis, but there is a get-out-of-jail-free card
http://www.telegraph.co.uk/
National and ACT agree to three-strikes regime (New Zealand)
http://www.scoop.co.nz/
Youth jails branded a 'disgrace' for leaving offenders in cells
http://www.cypnow.co.uk/news/
Playing of recorded music in prisons to be banned
http://www.guardian.co.uk/
Drug users' voices must be heard in the battle against addiction
http://www.guardian.co.uk/
Women's centre gives new lease of life to female offenders and their families
http://www.guardian.co.uk/
Attempt murder accused found dead
http://news.bbc.co.uk/1/hi/
Prison's 'outstanding' work put at risk from spending cuts
http://www.thisissouthdevon.
Private prison must offer medical care for inmates' babies, court says (US)
http://www.latimes.com/news/
Dutch MPs approve Belgium prison-rent deal
http://www.expatica.com/be/
Ex-cons' return to prison drops by half (Bahamas)
http://www.thenassauguardian.
Opposition to Govt's 'three strikes' sentencing policy (New Zealand)
http://www.stuff.co.nz/
New parole system proves to be successful (Malaysia)
http://thestar.com.my/news/
New cluster of prisons opens (Singapore)
http://www.straitstimes.com/
Russian Prisoners Begin Hunger Strike
http://www.rferl.org/content/
Rehabilitation jeopardised by media and the penal arms race
http://www.guardian.co.uk/
Mexico jail 'gang fight' kills 23
http://news.bbc.co.uk/1/hi/
The end of innocence: Inside Britain's child prisons
http://www.independent.co.uk/
Serving time - outside prison (Singapore)
http://news.asiaone.com/News/
'200,000 Are in 6 Prison Camps in North Korea'
http://www.koreatimes.co.kr/
Prison reform consensus builds but ministers fail to take heed
http://www.publicfinance.co.
Community corrections helps offenders re-enter society (US)
http://blog.oregonlive.com/
Hundreds of children already served many custodial sentences
http://www.cypnow.co.uk/
Police figures show unexpected 8% drop in crime
http://www.guardian.co.uk/uk/
We can't be complacent about falling crime
http://www.guardian.co.uk/
India yoga means less jail time
http://news.bbc.co.uk/1/hi/
Law and order: Criminal record
http://www.guardian.co.uk/
Saudi Arabia shifts 12 female inmates after prison riot
http://www.presstv.ir/detail.
Call to redirect prison funding (Australia)
http://www.theaustralian.com.
Guides to support mentoring projects for young offenders
http://www.cypnow.co.uk/